“I
l est des peuples comme des
hommes, il ne reste d’eux, après
la mort, que des choses éma-
nées de l’esprit, c’est-à-dire la littérature
et l’art, les poèmes écrits et les poèmes de
pierre, de marbre et de couleur”, disait le
professeur Lye M. Yoka (RDC). Même si ces
paroles limitent la culture à la littérature
et à l’art elles s’appliquent parfaitement à
l’Afrique. Plus que l’or de l’Afrique du Sud,
le diamant de la République Démocratique
du Congo et de l’Angola, le cacao de la Côte
d’Ivoire et du Ghana, ce que l’Afrique a de
plus original à offrir au monde, c’est sa
culture.
La question eut jadis paru sinon ba-
nale, du moins insensée dans le contexte
de la traite négrière et de la colonisation.
La sentence était claire : les peuples du
Sud qualifiés de “primitifs” étaient consi-
dérés sans culture, sans civilisation. Heu-
reusement que les Nations Unies, qui ont
décrété 2010 comme l’année internationale
du rapprochement des cultures, ont reconnu
que la traite négrière et l’esclavage furent de
grandes tragédies de l’histoire de l’humanité
L’église chrétienne orthodoxe éthiopienne monolithique de Beta Ghioghis à Lalibela,
une des villes les plus sacrées d’Éthiopie avec Axum.
© J.D. Dallet/Suds-Concepts
La grande mosquée Hassan II à Casablanca (Maroc) peut accueillir
environ 25 000 fidèles à l’intérieur et 80 000 à l’extérieur.
© J.D. Dallet/Suds-Concepts
et invité à réfléchir sur les possibilités
d’apaiser et de surmonter ces mémoires
douloureuses.
Une grande diversité culturelle
L’Afrique n’est pas qu’un “scandale géo-
logique”, selon les mots d’un géologue du
XIX
e
siècle. Avec ses 56 États, plus de mille
langues parlées, dont plus de cinquante
par plus de 500 000 personnes, un patri-
moine culturel riche et varié, bref une
grande diversité culturelle, l’Afrique est
aussi un scandale culturel et elle a beau-
coup à partager avec d’autres continents.
Son art remonte aux temps néoli-
thiques, avec les peintures et les gravures
rupestres qui, de la Mauritanie au Fezzan
et du Tassili à l’Ennedi, sont présentes dans
presque tous les massifs sahariens (6 000
avant J.-C. - I
er
siècle après J.-C.). Plus au
sud, les sculptures de terre cuite modelées
par les artistes de la civilisation Nok dans
le centre du Nigéria (500 avant J.C.- 200
après J.-C).), et qui, selon l’enseignement
tiré des fouilles récemment entreprises,
sont associées à des vestiges de travail du
fer. Elles préfigurent, dans le même pays,
les bronzes décoratifs d’Igbo Ukwu (IX
e
-X
e
siècle après J.-C.), les extraordinaires
sculptures de bronze et de terre cuite d’Ife
(XII
e
-XV
e
siècle apr. J.-C.) et celles du Bénin
(XII
e
-XIX
e
siècle). Elles montrent une telle
maîtrise technique et sont rendues avec
tant de naturel que l’on y a d’abord vu, à
tort, une inspiration classique.
Cette tradition artistique concerne la
sculpture (statues et masques), l’architec-
ture (habitations, greniers), les meubles, la
poterie, le tissage et les bijoux. La parure
corporelle, signe de distinction et de pro-
tection contre les mauvaises influences
(peintures corporelles, coiffes et coiffures,
scarifications et tatouages), les décors
polychromes sur les habitations et les gre-
niers, ainsi que les tissages forment égale-
ment une part importante de la symbolique
et de l’héritage artistiques.
En Afrique noire, un ensemble complexe
et varié de mythes et croyances, transmis
oralement ou via des parcours initiatiques
président à la vie spirituelle des peuples.
L’art africain reflète donc la richesse de
16 - Développement Durable en Afrique & Satellites