entre les traditions de l’Afrique et celles du
monde contemporain, renouvelant, en un
juste retour des choses, les audaces des
admirateurs de l’art nègre. Des artistes
comme Ousman Sow et Assane N’Noye du
Sénégal, Paul Ahyi du Togo, Twins Seven
Seven et Ashira Olatunde du Nigeria et
Nicholas Mukomberanwa du Zimbabwe
sont parmi les plus remarquables dans ces
nouvelles formes de création.
En République démocratique du Congo
et sur le pourtour du golfe de Guinée, une
peinture dite “naïve” reprend, comme les
masques dans les villages, les person-
nages d’une société urbaine contempo-
raine en crise : le fonctionnaire, le policier,
la prostituée, la femme volage, le militaire,
le buveur. Ils peignent, dans les cafés ou
sur les murs, des scènes d’enterrement,
une séance de pose chez le photographe,
une soirée au dancing, une scène de récon-
ciliation ou interpellation de la société.
La République démocratique du Congo
accueille ainsi certains des artistes les plus
populaires d’Afrique, comme Chéri Samba,
la coqueluche de Kinshasa, ou Tsibumba ;
Frédéric Bruly-Bouabre est, quant à lui, le
peintre le plus célèbre de Côte-d’Ivoire. La
démocratisation qui a favorisé une presse
hebdomadaire d’opinion a donné un sup-
port à la caricature politique directement
issue de cette imagerie populaire.
Art populaire et prix Nobel
La ville, où afflue tout ce que l’Occident
déverse sous la forme d’emballages ou de
mécaniques tombées en panne par manque
de pièces de rechange, fournit les matériaux
possibles pour un renouveau de l’expression
artistique, cette fois à l’initiative du créateur
seul qui devient un artiste au sens plein et
non plus un artisan, fût-il de génie, contraint
d’obéir à des canons esthétiques immuables.
Le fer-blanc des boîtes de conserve a de
multiples usages et le fil de fer de récupéra-
tion, de Dakar à Brazzaville en passant par
Lomé et Bamako, devient, entre les mains
d’enfants qui n’ont pas d’autres jouets,
camions, motos, bicyclettes, formule 1, avion
ou navette spatiale. Bien plus, à Kinshasa,
les guerres de “libération ” et “d’agression”
ont inspiré les artistes. Ainsi, les douilles,
conséquence des affrontements entre fac-
tions armées, sont récupérées et soudées,
parfois associées avec des objets de récupé-
ration pour donner naissance à une nouvelle
forme de sculpture, comme le montrent les
œuvres de Freddy Tsimba.
Foires et festivals panafricains ou inter-
nationaux distinguent des artistes afri-
cains. De même, le Marché des Arts du
Spectacle Africain (MASA) à Abidjan, le
Festival Panafricain du Cinéma de Ouaga-
dougou (FESPACO), la biennale de l’art
contemporain, Dak’Art, le Festival Panafricain
de Musique (FESPAM) de Brazzaville –
Ousmane Sow,
Guerrier debout
, détail (1987). Cet artiste né en 1935 à Dakar (Sénégal) a obtenu un diplôme
en physiothérapie. Il a choisi de se consacrer totalement à la sculpture à l’âge de cinquante ans.
© Béatrice Soulé / Roger-Viollet
Kinshasa, le Kora en Afrique du Sud…
constituent autant de marchés qui profitent
à la fois aux créateurs et managers afri-
cains et occidentaux.
Quant à la littérature africaine elle compte
des écrivains talentueux qui produisent des
œuvres de qualité outre-mer ou à l’intérieur
du continent, qui surplombent les rayons des
kiosques et librairies. L’Afrique n’a-t-elle pas
reçu quatre prix Nobel de littérature : Wole
Soyinka, Nigeria (1956), Naguib Mahfuz,
Egypte (1988), Nadine Gordiner et John
Maxwel Coetzee, Afrique du Sud (1993 et
2003) ! Que plusieurs biens culturels
africains soient inscrits sur la liste du
Patrimoine mondial est une preuve supplé-
mentaire de l’apport de l’Afrique au monde.
Chaque être humain, chaque peuple,
chaque nation, de par sa culture, son identité
positive, a un message qui lui est propre à
délivrer au monde et les moyens d’apporter
à l’humanité le génie de son imagination et
de sa créativité. De ce fait, l’Afrique a eu, a
et aura toujours une contribution à offrir à
l’humanité.
L’art africain traditionnel, particulière-
ment son symbolisme, a nourri l’inspira-
tion de sommités artistiques occidentales.
Il a inspiré certains des courants les plus
importants de l’art moderne du monde oc-
cidental par exemple l’art nègre découvert
par les peintres cubistes du début du XX
è
Identités - 19