TIC et développement durable
L
’Afrique est confrontée à un sérieux
retard, non seulement dans le domaine
des technologies de l’information et de
la communication (TIC) mais aussi, de manière
générale, en matière de grandes infrastruc-
tures. D’où une augmentation des coûts de
production et des transactions, ainsi qu’une
moindre compétitivité des entreprises, ce qui
compromet le développement économique et
social du continent. De nombreuses statis-
tiques sur les TIC mettent en évidence que
l’Afrique est le continent lemoins "connecté " :
faible nombre de ménages équipés d’un ordi-
nateur et d’une connexion Internet fiable,
accès limité à Internet pour la population âgée
de 16 ans et plus, faible nombre d’abonnés
disposant du haut débit, etc.
Les défis que doit relever l’Afrique en
matière de TIC :
• Manque de connectivité et d’accessi-
bilité, coûts trop élevés dans toutes les
régions rurales et éloignées, soit pour plus
de 70% d’une population estimée à environ
900 millions de personnes ;
• Absence de réseaux d’accès du fait de
la topographie du continent africain ;
• Besoin d’un réseau pour des commu-
nications intracontinentales et nationales,
à un coût raisonnable ;
• L’Afrique est une île au milieu de
l’océan des TIC et les pays africains sans
littoral sont eux-mêmes un archipel d’îles ;
• Développer les TIC en Afrique reste une
charge pour les populations les plus fragiles ;
• Faible pénétration du large bande
conduisant à des coûts encore très élevés.
Les objectifs du PIDA
Relever ces défis nécessite une approche
continentale intégrée s’attachant non seu-
lement à relier l’Afrique au reste du monde
mais aussi à mettre en place un système de
communications intracontinentales et natio-
nales. L’intégration à l’échelle régionale est
nécessaire pour remédier aux problèmes
posés par des économies africaines petites
et fragmentées.
Cette dynamique fait partie de la Vision
africaine 2040 du Programme de Développe-
ment des Infrastructures en Afrique (PIDA)
dont l’objectif est de permettre à tout Africain,
où qu’il soit sur le continent, d’accéder au
monde IP (voix et données) à un prix raison-
nable. Elle aspire à promouvoir un usage et
une gestion efficaces des ressources des TIC
pouraméliorer l’alphabétisation, réduire lapau-
vreté et soutenir le développement socio-
économique ainsi que la coopération régio-
Le satellite RASCOM-QAF 1R en cours d’intégration.
Placé sur une orbite géostationnaire, à une altitude
de 36000 km, il fournit des services de télécommu-
nications à tout le continent africain.
Thales Alenia Space. ©Serge Henri
nale. On estime que la population africaine va
atteindre 1,5 milliard d’individus – soit plus
que la Chine ou l’Inde !
Le PIDA a été lancé le 24 juillet 2010 à
Kampala (Ouganda) en marge de la 15
ème
As-
semblée des chefs d’État de l’Union africaine,
initiative conjointe de la Commission de l’Union
africaine (CUA), du Secrétariat du Nouveau
Partenariat Économique pour le Développe-
ment en Afrique (NEPAD) et du Groupe de la
Banque africaine de développement (BAD).
Son objectif est de fusionner l’ensemble des
initiatives continentales portant sur les infras-
tructures en un seul programme cohérent,
pour tout le continent. Son but principal : pro-
mouvoir le développement socio-économique
et la réduction de la pauvreté en Afrique grâce
à un meilleur accès aux réseaux ainsi qu’aux
services intégrés d’infrastructures régionales
et continentales. Pour assurer un développe-
ment durable il est essentiel de renforcer l’in-
tégration régionale. Les TIC constituent en
effet un véritable catalyseur aux effets trans-
versaux dans les programmes d’infrastruc-
tures pour l’énergie, les transports, etc.
Le PIDA s’inscrit dans la continuité de
l’Initiative Connecter l’Afrique lancée en
octobre 2007 à Kigali (Rwanda). Elle prévoit
de mobiliser des ressources pour mettre en
place des programmes de développement
d’infrastructures liés à la connectivité en
Afrique. Signe d’une volonté politique, les
deux projets, PIDA et Connecter l’Afrique, ont
bénéficié d’un soutien appuyé des dirigeants
africains. Ces initiatives/programmes sont
centrés sur le développement de très grandes
infrastructures, autour et à l’intérieur du
continent, pour des systèmes de communi-
cations large bande, en offrant davantage
d’accès à une grande partie de la population.
Alors que plusieurs projets de câbles à fibre
optique sous-marins sont mis en œuvre, le
lancement prévu de plusieurs satellites per-
mettra la couverture du continent africain.
Couplés à d’autres technologies, tous ces
systèmes viendront se compléter.
Rêver du futur
Ceci me rappelle les tambours dont les
battements constituent depuis une centaine
d’années un moyen de communication. Leurs
sons résonnent comme des flots de bits pro-
pageant leurs messages au fil des heures. Ce
sont les tambours parleurs (tamas). On les
utilise encore dans les villages de nombreux
pays africains pour annoncer les mauvaises
nouvelles, appeler àun rassemblement, convo-
quer une réunion et diffuser toutes sortes de
messages. La façon dont on les bat indique
l’importance de l’information.
Les africains sont attachés aux tambours
et à leurs battements parce qu’ils les ont
accompagnés pendant de nombreuses an-
nées. Nous savons aujourd’hui que les TIC,
source d’information, de communication et
aussi de connaissance, peuvent être un outil
essentiel mis au service du développement
durable. Et, pour faire partie de la société
mondiale de l’information, l’Afrique a plus que
jamais besoin d’autres tambours et de leurs
battements. Alors, tambours, soyez les bien-
venus et profitons de vos battements !
c
Dr Jones Killimbe
PDG, RASCOM
Abidjan, Côte d’Ivoire
Monument des joueurs de tambours sacrés près
de l’aéroport d’Abidjan (Côte d’Ivoire). Le son de ce
puissant double tambour parleur appelle à l’action.
©Jones Killimbe
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